Premier témoignage sur la richesse de la bibliothèque de la Mission Bretonne.
Par Karen Massart, qui a l'honneur d'être l'une des premières personnes sélectionnées dans le cadre d'un concours littéraire ayant pour thème Le canal de Nantes à Brest : http://www.smatah.fr/article/articleview/332/1/117/
Comment peut-on être breton
Essai sur la démocratie française
Morvan Lebesque
Essai sur la démocratie française
Morvan Lebesque
Comment peut-on être breton ? Quarante ans après…
« Je découvris que j’avais une patrie. Et je sus ce qu’était une patrie. Quelque chose qui vous rend heureux. »
Morvan Lebesque, de son vrai nom Maurice Lebesque, ancien chroniqueur du Canard enchaîné, était un journaliste et essayiste breton né à Nantes en 1911 et disparu en 1970.
Ecrit pendant les évènements de Mai 68, Comment peut-on être breton ? est un essai politique.
C’est de ce texte qu’est tirée la célèbre chanson de Tri Yann : La découverte ou l’ignorance.
Toute la question est posée ici. Pourquoi se revendiquer breton et qu’est-ce qui nous définit comme tel ? « La Bretagne n’a pas de papiers. Elle n’existe que dans la mesure où, à chaque génération, des hommes se reconnaissent bretons. »
Mais Comment peut-on être breton ? n’est pas réservé aux seuls Bretons, il comporte en réalité deux problématiques : la découverte - ou la redécouverte - de notre identité bretonne - ou de toute autre identité régionale, mais surtout, il s’agit d’un essai politique sur la démocratie, mettant en lumière « l’exception » française. Morvan Lebesque reproche à l’Etat français, qu’il soit monarchique, impérial ou républicain, d’avoir « assassiné » ses peuples en les formatant tous au même moule : le modèle de référence parisien. « Pour préserver son dogme centraliste, il censure la pensée et la culture de ses peuples. »
Pour Morvan Lebesque, la république que nous appelons démocratie a conservé une structure monarchique. Les vraies questions seraient finalement : Comment peut-on être français tout en restant soi-même ? La démocratie est-elle possible dans un Etat centraliste ?
Morvan Lebesque utilise la Bretagne et son aliénation culturelle comme cas d’école pour étayer sa thèse : l’Etat français, qu’il dissocie nettement du peuple français, a été par le passé et reste anti-démocratique.
Ce phénomène n’est pas réservé aux seuls Bretons mais à l’ensemble des peuples de France. « C’est pourtant pour lui [le lecteur non Breton] que j’écris, pour lui d’abord.» « Je suis vous, même si vous n’êtes pas Bretons, même si vous ne vous souciez pas de vos origines ou en avez perdu jusqu’au souvenir. »
Du particulier breton, il nous amène au général et enfin à l’universel.
Dans un chapitre autobiographique, il retrace son cheminement vers sa « bretonnité ». De son enfance nantaise où il ne se considérait pas breton au jour où, par hasard, il découvre une inscription sur un monument nantais An dianav a rog a c'hanoun : l’inconnu me dévore. Ces quelques mots gravés dans la pierre vont être une révélation, une prise de conscience. Il se rend alors compte que Jeanne d’Arc n’est pas sa bergère, que les rois de France ne sont pas ses rois, que ses ancêtres avaient leurs propres souverains. Il comprend que l’Histoire de France est l’Histoire de l’Etat français et non des français et que la Bretagne a non seulement sa langue, mais aussi son Histoire, une Histoire riche mais censurée.
Morvan Lebesque se réclame « breton, français et citoyen du monde ». Il réclame pour la Bretagne une ouverture sur le monde.
Amoureux de cette Bretagne qui l’habite, il peut parfois se laisser aller à des élans passionnés, il n’hésite pas à dénoncer, à condamner. « Parole assassinée », privation d’Histoire, folklorisme dans lequel on relègue la Bretagne : Bécassine, Botrel, Anne de Bretagne, Du Guesclin, « biniouseurs »…
Il rêve d’une Bretagne moderne, libérée de ses archaïsmes et ses clichés réducteurs, entrant dans une nouvelle ère prospère et ouverte sur l’Autre et le Monde.
« Je ne puis servir les autres qu’en étant moi-même. Cela s’appelle la démocratie, qui n’est que l’ordre naturel des hommes.
Karen Massart-Gloux
MBTAV octobre 2011.
Critique bien écrite et fort intéressante.
RépondreSupprimerJ'ai beaucoup aimé.
Magali